De plus en plus de couples aujourd’hui empruntent les sentiers du libertinage afin de rester désespérément ensemble malgré leur lassitude à partager leur vie. Ils mettent sur le compte de la complicité et de l’ouverture d’esprit leurs nouvelles fantaisies sexuelles. Mais sont-ils véritablement bien dans ce schéma sexuel ou cherchent-ils simplement à gagner du temps avant la rupture inévitable ?
La plupart des couples se lançant dans l’aventure de l’échangisme, du triolisme ou du mélangisme affirment le faire sur une base de confiance mutuelle solide. Les partenaires admettront aussi que leur but est uniquement de pimenter leur vie sexuelle, de réaliser des fantasmes sans avoir à quitter leur conjoint. De plus, ils vous diront que tout est fait dans le respect de l’autre et des autres. Et enfin, que la décision de passer du fantasme à l’acte est un choix commun. Cependant, il y a un petit bémol à cette délicieuse histoire sans nuages.
Dans la majorité des cas, c’est l’homme qui amène l’idée de pimenter la vie sexuelle en la partageant avec d’autres personnes. Dans la majorité des cas, l’homme met un certain temps à convaincre sa partenaire du bien-fondé de l’expérience. Dans la majorité des cas, la femme finit par accepter pour préserver le couple. L’autre hic, si l’on peut dire, dans cette exceptionnelle histoire de complicité, c’est que malgré toutes les notions de respect mutuel mises de l’avant, c’est la femme qui sert de monnaie d’échange. Jamais l’homme. Au terme de la négociation, le seul respect observable est que l’homme permette à sa compagne de refuser ou d’accepter le marché.
On est donc assez loin de l’image idyllique, de la complicité merveilleuse à laquelle on veut nous faire croire lorsqu’il s’agit d’échangisme, de mélangisme ou de triolisme. On découvre facilement, en prêtant attention à la façon dont fonctionnent les clubs ou les bars d’échangistes, que le phénomène est d’abord le fait du désir masculin. C’est pour l’homme, une façon de cautionner son propre désir d’infidélité puisqu’il rend sa partenaire complice et consentante de ce choix. De plus, il s’agit de la formule idéale pour tromper le ou la partenaire tout en conservant le contrôle sur l’autre.
Mais comme cela est souvent le cas, il arrive que l’initiateur du projet d’échangisme, de triolisme ou de mélangisme, quoiqu’il se vante sur tous les toits de l’invulnérabilité de son couple, se fasse prendre à son propre jeu et réalise, trop tard, que sa partenaire se révèle à travers ses jeux coquins. Quand l’autre prend soudain conscience que son compagnon d’origine est un bien piètre amant ou que l’homosexualité (souvent par le biais du triolisme) est le type de relation qui lui correspond profondément, l’initiateur se sent du coup trahi. Alors non seulement la jalousie se met en route, mais la rupture est assurée.
Les fantasmes masculins en matière d’échanges sexuels négligent, presque dans la majorité des cas, de considérer les possibles conséquences de ces jeux périlleux. L’homme reste si sûr de sa partenaire (qu’en général, il domine) qu’il entretient la fausse idée que sa femme est éprise de lui au point de ne pas pouvoir faire de comparatif. Et c’est là que le bât blesse.
Trois cerveaux régissent la pensée humaine. Le plaisir à l’état pur se trouve dans le cerveau reptilien (sexe) alors que les émotions logent à l’enseigne du cerveau mammalien (passion) et qu’enfin, les sentiments, la conscience et la morale sont abrités dans le néo-cortex (amour). L’homme a cette vilaine tendance à dissocier le sexe de l’amour tandis que la femme peut difficilement s’épanouir sexuellement sans un sentiment d’amour ou de passion, à tout le moins. Or dans la conception du commerce sexuel à plusieurs, ou entre couples, il ne devrait normalement, selon la perception masculine, entrer que la part du sexe. Mais comme la femme participe également à la transaction, elle laissera tôt ou tard filtrer émotions et sentiments afin de ressentir un minimum de plaisir dans l’aventure. Et c’est à ce moment précis que le négociateur perd sa monnaie d’échange ! Prendre le risque ou non, là est la question...